Detttes fiscales attestation ou intégration automatique

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DETTES FISCALES : ATTESTATION OU INTEGRATION AUTOMATIQUE? 

 

Sachant que tous les créanciers doivent fournir au contribuable des attestations écrites sur le montant et les intérêts de leurs créances,  quand est-t-il lorsque c’est l’administration fiscale qui est la créancière du contribuable?

 

La déductibilité des dettes fiscales et corollairement des intérêts débiteurs facturés aux contribuables par le service du recouvrement de l’administration fiscale est devenue une question d’importance pour la plupart des contribuables.

Par le passé seuls les contribuables étant en retard dans le paiement de leur bordereau de taxation étaient concernés par la problématique des intérêts (moratoires) débiteurs. Mais depuis l’avènement des intérêts (financiers) débiteurs à charge du contribuable qui n’aurait pas payé, en suffisance, des acomptes provisionnels, le nombre de contribuables concernés par cette problématique a explosé. De plus avec l’application de taux différents depuis 2013 entre le taux des intérêts rémunératoires versés sur un « trop payé » d’une année (0.5%) et le taux facturé sur le « pas assez versé » d’une autre année (3%), le contribuable est toujours perdant et est donc redevable d’intérêts débiteurs.

En outre en ce qui concerne les dettes fiscales, depuis le passage au système d’imposition postnumerando (taxation de l’année fiscale sur la base des revenus et fortune de l’année fiscale), TOUS les contribuables devant s’acquitter d’un impôt sur les revenus au niveau de l’IFD sont devenus ipso facto titulaire d’une dette fiscale envers l’AFC au 31 décembre de l’année fiscale.

Dès lors comment le contribuable peut-il faire valoir en déduction ses dettes fiscales et les intérêts débiteurs y relatifs ?

Des dispositions légales de procédure

La loi de procédure fiscale (LPFisc) est entrée en vigueur le 1er janvier 2002.

La loi relative à la perception et aux garanties des impôts des personnes physiques et des personnes morales (LPGIP) est entrée en vigueur le 1er janvier 2009.

La LPGIP a quelque peu changé la situation qui prévalait jusqu’alors depuis 2002 (date d’entrée en vigueur de la LPFisc) et jusqu’à 2009 (date d’entrée en vigueur de la LPGIP), puisqu’elle a instauré l’établissement de réels décomptes fiscaux intermédiaires et finaux.

De l’AFC et des dettes fiscales en capital et intérêts

La loi de procédure fiscale prévoit notamment :

  • à l’article 25 alinéa 1 que « Le département établit les éléments de fait et de droit permettant une taxation complète et exacte, en collaboration avec le contribuable »
  • à l’article 32 alinéa 1 lettre b que « Doivent fournir au contribuable des attestations écrites : …b) les créanciers et les débiteurs, sur l’état, le montant, les intérêts des dettes et créances.. »
  • à l’article 32 alinéa 2 que « Lorsque le contribuable ne produit pas les attestations requises, le département peut les exiger directement du tiers. »

Ainsi au regard de ces dispositions de la loi de procédure fiscale, l’AFC devrait :

  • de première part, établir les éléments de faits, c’est-à-dire en l’occurrence l’état des créances et dettes fiscales en capital et intérêts du contribuable ;
  • de deuxième part, en sa qualité de créancière, respectivement débitrice, fournir au contribuable une attestation sur l’état, le montant, les intérêts de ses dettes et créances ;
  • de troisième part, en sa qualité d’autorité de taxation, sommer le contribuable de produire l’attestation qu’elle-même en sa qualité de créancière aurait dû lui fournir (cf. ci-dessus) ;
  • de quatrième part, si le contribuable ne lui avait (ou pouvait) pas lui remettre l’attestation y relative, d’exiger – d’elle-même – la remise de ladite attestation.

Aussi en cas de dette et d’intérêts financiers et/ou moratoires, l’AFC se devrait de les intégrer lors de la taxation du contribuable.

Des attestations et de l’automatisme

Avant l’avènement de la LPGIP, aucun décompte intermédiaire ni final tels que ceux stipulés aux articles 11 et 17 LPGIP n’étaient prévus dans la LCP (loi sur les contributions publiques) et la LPFisc.

La LPGIP a changé la situation puisqu’elle a instauré l’établissement de réels décomptes intermédiaires et finaux.

Toutefois l’AFC lorsque qu’elle adresse le formulaire de déclaration au contribuable ne joint QUE la situation des acomptes versés pour l’année fiscale MAIS en aucun cas des attestations de dettes et intérêts pour d’autres années fiscales !

Cela n’est pas conforme à ce que l’on pourrait attendre d’une administration fiscale créancière et facturant des intérêts financiers et/ou moratoires.

La situation se corse encore pour la dette IFD,l’éventuelle dette ICC et intérêts financiers y relatifs de l’année fiscale pour laquelle le contribuable est appelé à rédiger sa déclaration, puisque l’AFC ne saurait émettre une attestation de dette et intérêts qu’APRES avoir procédé à la taxation du contribuable… ; il ne lui reste donc plus qu’à intégrer ces éléments d’AUTORITE et AUTOMATIQUEMENT en complétant la déclaration déposée par le contribuable afin de le taxer régulièrement.

Attitude à adopter

Tout contribuable peut faire valoir en déduction de ses revenus  les intérêts de ses dettes lorsque ceux-ci sont échus et exigibles en application des articles 34 lettre a LIPP et 33 alinéa 1 lettre a LIFD) et peut déduire ses dettes existantes au 31 décembre de l’année fiscale.

Donc, le contribuable peut soit :

  • interpeller l’AFC (préalablement à la rédaction de sa déclaration fiscale) pour qu’elle lui fournisse les attestations de dettes et intérêts concernant toutes les années fiscales antérieures (en application de l’article 32 alinéa 1 lettre b LPFisc) afin de pouvoir les mentionner dans sa déclaration fiscale
  • soit afin d’éviter une surcharge de courrier à l’AFC (en évitant par ailleurs de contribuer à la déforestation…) le contribuable peut préciser dans les observations de sa déclaration :  « Le contribuable invite l’AFC à compléter l’état des dettes en ajoutant ses dettes fiscales pour toutes les années fiscales antérieures, ainsi qu’à rajouter tous les intérêts débiteurs qu’il devrait ou aurait dû au regard des dettes fiscales existantes au 31.12 de la présente année fiscale ou ayant été remboursées pendant la présente année fiscale »

En outre ET DANS TOUS LES CAS, pour les dettes fiscales de l’année (solde ICC non couvert par les acomptes provisionnels versés et montant IFD dû) et intérêt financiers y relatifs …) le contribuable doit préciser dans les observations de sa déclaration :  « Le contribuable invite l’AFC à compléter sa déclaration en incluant , le cas échéant, le solde ICC non couvert par les acomptes provisionnels versés et le montant IFD dû pour la présente année fiscale ainsi que les intérêts financiers y relatifs »

Conclusions

Sachant qu’à Genève, une dette fiscale de CHF 10’000.-  non prise en compte occasionnera jusqu’à CHF 100.- (1%) de supplément d’impôt sur la fortune et que des intérêts débiteurs de CHF 100.- non déduits occasionneront jusqu’à CHF 40.- (40%) d’impôts (ICC et IFD) supplémentaires, tout contribuable serait bien inspiré de demander la juste application de la loi en la matière.

Publiée le 07 mars 2016

 

 

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Par Maître Michel LAMBELET Avocat – Expert en Fiscalité.

Président de l’AGEDEC. Tout l’immobilier, la Chronique de l’AGEDEC, (Association Genevoise pour la Défense du Contribuable) association créée en 2005 dont les membres fondateurs ont été Monsieur et Madame LARPIN ainsi que Me LAMBELET.

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